Politique climatique

Politique climatique : quelles sont les mesures les plus efficaces ?

Si vous avez lu l’article « Chacun doit faire sa part« , vous savez que les actions individuelles, bien qu’indispensables, ne peuvent suffire à elles-seules pour limiter le réchauffement climatique à 2°C. L’atteinte des objectifs de l’accord de Paris passe nécessairement par une politique climatique ambitieuse, s’appuyant sur des mesures efficaces et parfois radicales.

I. « QUOI QU’IL EN COÛTE »

Dans son allocution du 12 mars 2020 sur la crise sanitaire du Coronavirus, Emmanuel Macron a employé trois fois l’expression « quoi qu’il en coûte ». Tout d’abord pour dire qu’il fallait mobiliser tous les moyens financiers nécessaires pour sauver des vies. Ensuite, pour affirmer que tout devait être mis en œuvre pour protéger les salariés et les entreprises. Enfin, pour expliquer que l’ensemble des gouvernements européens devaient prendre les décisions de soutien et de relance économique qui s’imposaient…. et on ne peut qu’être d’accord avec lui.

Mais n’y-a-t-il pas un parallèle à faire avec la crise climatique que nous sommes en train de vivre : moins brutale que celle du Coronavirus, certes, mais aux conséquences à moyen et long termes encore plus dévastatrices pour la société humaine dans son ensemble.

Car aujourd’hui, le doute et l’inaction ne sont plus permis. On le sait, depuis la fin du XIXe siècle, la température moyenne mondiale a augmenté de 1,1°C (Climate.copernicus.eu, 2018) et les premières conséquences de ce réchauffement sont là pour en témoigner : doublement de la fréquence des canicules en France, inondations et sécheresses à répétition, feux de forêts dévastateurs en Australie, etc.

Et ce n’est malheureusement qu’un prémisse de ce qu’il pourrait arriver si les émissions de gaz à effet de serre ne sont pas réduites fortement au cours des prochaines années. Si tel est le cas, nous allons tout droit vers un réchauffement de +1,5°C entre 2030 et 2052, +2°C avant la fin du siècle et +3°C en 2100 (CAT, 2019).

Alors, sachant tout ça et afin d’éviter une situation ingérable, les États ne devraient-ils pas agir contre le changement climatique « quoi qu’il en coûte » ?

Mais au fait, combien ça coûte ? (Citoyenspourleclimat.org, 2019)

Limiter nos émissions demande des investissements importants en termes d’infrastructures, que ce soit pour réduire notre demande énergétique ou pour investir dans des modes de production d’énergie moins polluants.
Le GIEC estime le coût des investissements à faire pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C à environ 2 400 milliards de dollars par an entre 2016 et 2035, soit 2,5 % du PIB mondial.
Une somme importante, certes… mais comme pour la crise du Coronavirus, ne pas dépenser ces milliards à court terme reviendrait à en dépenser beaucoup plus à long terme pour réparer les dommages causés par le changement climatique aux hommes, aux écosystèmes et aux infrastructures (4 à 5 fois plus selon les estimations actuelles).

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II. L’ACCORD DE PARIS SUR LE CLIMAT : UN PREMIER PAS

Après l’échec du protocole de Kyoto (1997)*, l’accord de Paris est un réel premier pas dans la lutte internationale contre le changement climatique. Adopté par 195 pays le 12 décembre 2015, son objectif est de « contenir l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels et de poursuivre l’action menée pour limiter l’élévation de la température à 1,5°C« .

Dans cette formulation complexe, on décrypte que :

  • le seuil limite à ne pas dépasser est + 2°C : car au delà, le monde s’expose à des conséquences catastrophiques et irréversibles ;
  • le seuil visé est + 1,5°C : car les effets du changement climatique seraient bien moindres qu’à +2°C

Si le texte ne mentionne aucune réduction chiffrée des émissions de gaz à effet de serre, le GIEC (Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat) préconise les trajectoires suivantes :

Politique climatique - GIEC - Trajectoire de baisse des émissions de gaz à effet de serre

Le document de l’Accord de Paris stipule également que les pays développés « doivent » assister financièrement les pays en développement tant au niveau de l’adaptation au réchauffement climatique que de l’atténuation des émissions de gaz à effet de serre, qui suppose notamment le développement des énergies renouvelables (Novethic.fr, 2020c).

Les pays ont formulé des premiers engagements qui doivent être révisés à la hausse tous les 5 ans à partir de 2020 afin d’atteindre l’objectif de +2°C maximum, voire mieux. Les engagements actuels nous entraînent pour l’instant sur une trajectoire de 3°C environ** et encore, s’ils sont respectés ! En effet, le principal bémol de l’accord de Paris est l’absence d’organe de contrôle indépendant ainsi que l’absence de sanctions internationales en cas de non respect des engagements.

Sous l’impulsion de Donald Trump, les Etats-Unis ont engagé leur retrait de l’accord de Paris, qui ne sera toutefois effectif que le 4 novembre 2020… soit le lendemain de la prochaine élection présidentielle américaine. S’il se confirme sur le long terme, ce retrait diminuerait la portée de l’accord, puisque les Etats-Unis sont le 2ème émetteur mondial de gaz à effet de serre.

1989 : L’histoire d’une occasion manquée (D’après Lesinrocks.com, 2019, se basant sur l’enquête de Rich, 2019)

Fin 1989, dans une station balnéaire des Pays-Bas, a lieu le premier sommet international sur le réchauffement climatique. Soixante nations s’apprêtent à signer un traité planétaire juridiquement contraignant, dans le but de stopper le réchauffement climatique.

C’était long. Mais les dirigeants du monde ont pris conscience de l’urgence – même George Bush semble acquis à la cause. Un objectif chiffré est prévu : geler les émissions de gaz à effet de serre à leur niveau de 1990, et ce à l’horizon 2000.

Pourtant, ce 6 novembre 1989, dans le huis clos de la salle de réunion où se tient la négociation finale, Allan Bromley, le conseiller scientifique de George Bush, fait tout chavirer, sur ordre de John Sununu, directeur de cabinet du président américain. “A la demande de John Sununu et avec l’assentiment de la Grande-Bretagne, du Japon et de l’Union soviétique, Bromley avait forcé l’assemblée à renoncer à un engagement à geler les émissions”, résume Nathaniel Rich, journaliste au New York Times.

On connait la suite de l’histoire : il aura fallu attendre 8 ans pour aboutir à un premier accord sur le climat (le Protocole de Kyoto, avec l’échec que l’on connait*)… et 18 ans de plus pour l’accord de Paris (non juridiquement contraignant) : et pendant ce temps là, la Terre s’est réchauffée.

*Le protocole de Kyoto est désormais dépassé par rapport aux enjeux planétaires car les pays signataires ne représentent plus que 15 % des émissions de gaz à effet de serre mondiales : la Chine et les Etats-Unis, premiers émetteurs ne l’ont pas signé ; le Canada, la Russie et le Japon se sont retirés du protocole en 2012.

**3,2 °C selon les nations unies (PNUE, 2019) et 2,8°C selon Carbon Action Tracker (CAT, 2019)

III. LES GRANDES ORIENTATIONS D’UNE POLITIQUE CLIMATIQUE

Pour respecter l’accord de Paris, il faut réduire drastiquement nos émissions de gaz à effet de serre afin de limiter la hausse de la concentration de ces gaz dans l’atmosphère, et le réchauffement associé.

Ainsi, la concentration de CO2 dans l’atmosphère, qui augmente chaque année de 0,6 % environ (Climate.copernicus.eu, 2018b) ne doit pas dépasser le seuil de 450 ppm* à l’horizon 2100 si l’on veut espérer contenir le réchauffement en dessous de 2°C.

Politique climatique : augmentation de la concentration de CO2 atmosphérique
Source : CGDD, 2019

Mais il ne faut pas non plus oublier le méthane (responsable de 32 % du réchauffement actuel), le protoxyde d’azote (6 %), les gaz fluorés et l’ozone (6 %) dont les émissions doivent également être réduites (CGDD, 2018 ; Dessus, 2014).

Doit-on revenir à l’âge de pierre ?

Non, car heureusement pour nous, une partie de nos émissions de gaz à effet de serre est compensée par des processus d’absorption naturelle. Depuis les années 1980, la biosphère terrestre (essentiellement les forêts) et les océans ont absorbé environ 50 % des émissions anthropiques de CO2. Sans ce phénomène, le réchauffement climatique serait beaucoup plus élevé que celui observé aujourd’hui (GIEC, 2007b).
Limiter le réchauffement à 1,5°C ou 2°C, ce n’est donc pas « ne plus polluer du tout », mais plutôt « beaucoup moins polluer ».

*PPM = Parties Par Millions = Unité qui exprime le nombre de molécules d’un gaz par million de molécules présentes dans l’air

PREMIÈRE ORIENTATION : décarboner l’énergie !

En Europe et dans le Monde, l’utilisation de l’énergie est la première source d’émission de gaz à effet de serre (GES).

Rien d’étonnant quand on sait que les énergies fossiles (charbon, gaz et pétrole), qui émettent de grandes quantités de CO2 lors de leur utilisation, sont largement dominantes dans le monde (81 % de l’énergie consommée), loin devant les énergies renouvelables (environ 14 %, part qui a peu évolué depuis 40 ans) et l’énergie nucléaire (5 %) (CGDD, 2018). Même en France, pays du nucléaire, elles représentent environ 63 % de l’énergie consommée en 2016 (Citoyenspourleclimat.org, 2019).

Vous l’avez compris : pour réduire les émissions de CO2, il faut diminuer l’utilisation des énergies fossiles, et en premier lieu le charbon et le pétrole, qui sont les combustibles les plus polluants.

En contrepartie, le GIEC met en évidence la nécessité de s’appuyer sur toutes les solutions « décarbonées » disponibles et en particulier les énergies renouvelables (entre 70 % et 85 % du mix électrique en 2050) et l’énergie nucléaire, en adaptant bien sûr le mix énergétique aux spécificités géographiques, économiques et politiques de chaque pays (Citoyenspourleclimat.org, 2019).

Les énergies fossiles sont la première source d'émissions de gaz à effet de serre
Pour rester sous les 2°C, il ne faut pas exploiter plus de 20 à 25 % des réserves prouvées de charbon, gaz et pétrole – Source image : Pixabay

Mais, comme les ressources fossiles sont présentes en quantité limitée sur Terre, n’est-il pas suffisant d’attendre qu’elles s’épuisent d’elles-mêmes ? Non, car il en reste encore « beaucoup trop ». En 2012, le GIEC estimait que pour rester sous les 2°C, il ne fallait pas exploiter plus de 20 à 25 % des réserves prouvées de charbon, gaz et pétrole. Ainsi, même si la date d’arrivée du pic de production de pétrole reste controversée, l’Agence Internationale de l’Énergie estime que la trajectoire actuelle de consommation ne devrait pas s’infléchir avant 2040… donc bien trop tard ! (Notre-planete.info, 2019).

Une transition rapide vers des énergies moins polluantes passe donc par une politique climatique volontariste, dotée :

  • d’une réglementation contraignante, visant à interdire les services ou objets les plus polluants : par exemple l’interdiction progressive des véhicules thermiques au profit des voitures électriques ou hybrides ;
  • d’investissements massifs dans les énergies « bas carbone » : le « Green New Deal » de la nouvelle commission européenne en est une illustration (Notre-planete.info, 2020) ;
  • d’une taxe carbone : il s’agit d’une taxe ajoutée au prix de vente de produits ou de services, dont le montant est calculé en fonction de la quantité de gaz à effet de serre émis lors de leur utilisation (INSEE, 2016b).

Cette dernière permet tout d’abord d’encourager les comportements vertueux, en poussant les collectivités, entreprises et citoyens à réduire leur consommation d’énergies fossiles et à s’orienter vers des alternatives moins polluantes. Elles permet également de générer des recettes permettant de réaliser les investissements « bas carbone » nécessaires (Notre-planete.info, 2020).

DEUXIÈME ORIENTATION : réduire la consommation d’énergie

Il ne suffit pas de produire de l’énergie moins carbonée… il faut également en consommer (beaucoup) moins, pour les bâtiments, l’agriculture, les transports, les industries, etc.

Pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris, il faudrait par exemple réduire de moitié voire de trois quarts la consommation d’énergie des bâtiments (Citoyenspourleclimat.org, 2019).

La baisse de la consommation énergétique passe par :

  • une efficacité plus élevée de nos équipements : par exemple une chaudière/isolation plus performante ou un véhicule émettant moins de CO2 par kilomètre parcouru ;
  • une sobriété énergétique : par exemple baisser la température consigne de son chauffage ou faire moins de déplacements en voiture.

TROISIÈME ORIENTATION : capturer le CO2

Si nous voulons maintenir les températures terrestres à un niveau acceptable, nous devons également augmenter l’obsorption du CO2 de l’atmosphère.

A l’échelle mondiale, la biosphère – c’est à dire essentiellement les forêts – compense 19 % des émissions humaines annuelles de gaz à effet de serre (15 % en France). Merci aux végétaux qui captent chaque année 10 Gigatonnes CO2 de l’atmosphère, via la photosynthèse !

La forêt capte le CO2 atmosphérique
Source : Pixabay

A l’inverse, la déforestation entraîne des rejets de gaz à effet de serre par la combustion et la décomposition des matières organiques, qui représentent environ 12 % des émissions d’origine humaine dans le monde (CGDD, 2019). On pense bien sûr à la déforestation en Amazonie ou aux incendies qui ont frappé l’Australie en 2019-2020, détruisant près de 20 % de la forêt du pays et générant autant de CO2 que le pays en émet habituellement chaque année (Novethic.fr, 2020a et 2020b).

Pour augmenter la capacité d’absorption de CO2 de la biosphère, il faut donc développer des politiques de préservation et de restauration des écosystèmes : stopper la déforestation, reforester, restaurer les zones humides, etc.

Mais attention : il ne suffit pas de planter des arbres pour « sauver le climat » ! Les simulations informatiques montrent que si l’on souhaitait limiter le réchauffement climatique uniquement via une politique de plantation, il faudrait remplacer l’ensemble des écosystèmes naturels de la planète par des peupliers et certains types arbustes, ce qui n’est évidemment pas une solution. La fameuse « compensation carbone » proposée lorsqu’on achète un billet d’avion a ses limites… (Notre-planete.info, 2019b). De même, replanter des forêts au détriment des surfaces agricoles dans un monde avec une population grandissante peut accroître la vulnérabilité alimentaire de certaines régions (Citoyenspourleclimat.org, 2019).

Les plantes absorberont-elles toujours autant de CO2 ? (d’après Novethic.fr, 2019)

Jusqu’à présent, plus la concentration de CO2 atmosphérique augmente et plus les plantes absorbent le CO2 grâce à la photosynthèse : le carbone « booste » leur croissance. Mais avec une explosion des émissions de CO2, certains scientifiques craignent que les plantes ne suivent plus le rythme.

Une étude publiée dans la revue Nature en janvier 2019 va encore plus loin. Elle affirme clairement que le réchauffement climatique va affecter la photosynthèse des plantes et que ces dernières vont commencer à absorber moins de gaz à effet de serre.

Pour compléter l’absorption naturelle, les industriels (et notamment certains des plus « gros pollueurs » comme TOTAL) développent depuis quelques années des techniques de capture et de stockage du CO2. Ces techniques consistent à « capturer » le dioxyde de carbone émis par des usines utilisant du charbon, du pétrole, du gaz naturel, du bois… puis à le stocker dans le sous-sol terrestre pour éviter son rejet dans l’atmosphère.

On estime que les usines équipées d’un tel système émettraient 80 % à 90 % de CO2 en moins… mais consommeraient 10 % à 40 % d’énergie en plus (Novethic.fr, 2020d). Et rappelez-vous, il n’y a pas que les usines qui émettent des gaz à effet de serre : ces techniques sont donc très insuffisantes à elles seules pour « régler le problème » du dérèglement climatique !

Mais je laisse Fred, Jamy et la petite voix vous expliquer tout ça (jusqu’à 23 min 02) :

IV. QUELLES SONT LES MESURES POLITIQUES LES PLUS EFFICACES ?

Les autorités publiques doivent mettre en œuvre un ensemble de mesures concrètes pour appliquer les grandes orientations présentées ci-avant .

En voici quelques unes tirées de deux études récentes.

La première étude a été réalisée par le cabinet B&L Evolution (B&L Évolution, 2018). Elle propose un ensemble de mesures (qui, pour certaines, peuvent sembler irréalistes) à appliquer en France pour s’aligner sur une trajectoire d’un réchauffement de 1,5 °C, soit une réduction de 63 % des émissions de CO2 entre 2017 et 2030.

La seconde étude a été menée par l’écologiste et entrepreneur Paul Hawken et s’intitule « Drawdown*, comment inverser le cours du réchauffement planétaire » (Hawken, 2018). Avec 70 chercheurs internationaux, il a établi une liste des 100 mesures les plus efficaces pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Ces mesures sont classées de 1 (la plus efficace) à 100.

Politique climatique - Panel de solutions pour atténuer le changement climatique
Panel de solutions pour atténuer le changement climatique – Source des données : B&L Evolution, 2018 et Hawken, 2018 (projet Drawdown) – © Ecotoxicologie.fr – Licence : Tous droits réservés

*Le Drawdown, c’est le point de bascule à partir duquel la concentration de gaz à effet de serre dans l’atmosphère se met à diminuer après avoir atteint un pic.

Quelques enseignements du projet Drawdown

Selon Hawken, si 80 des 100 solutions proposées étaient mises en œuvre entre 2020 et 2050, elles pourraient permettre d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Et même si les 20 premières solutions seulement étaient appliquées, cela permettrait de réduire nos émissions de gaz à effet de serre de 80 %, et nous placerait sur une trajectoire compatible avec un réchauffement limité à + 2°C.

La mesure n°1 (donc la plus efficace) ne concerne pas le CO2… mais les CFC et HFC (famille des gaz fluorés), qui sont des gaz à effet de serre beaucoup plus puissants que le dioxyde de carbone, mais heureusement rejetés en moins grande quantité. Via un amendement au protocole de Montréal, le monde devrait commencer à les éradiquer entre 2019 (pays à hauts revenus) et 2028 (pays à bas revenus), permettant ainsi d’éviter l’émission de près de 90 gigatonnes d’équivalent CO2 dans l’atmosphère (Novethic.fr, 2019f).

L’alimentation apparaît comme le premier levier de réduction de nos gaz à effet de serre devant l’énergie et l’affectation des terres. Ainsi, certaines mesures comme « la réduction du gaspillage alimentaire » ou « l’alimentation moins riche en calories et en viande » sont beaucoup plus efficaces que d’autres mesures emblématiques comme « le déploiement des véhicules électriques » (26ème mesure avec « seulement » 10 Gt CO2 évitées). En Europe, cette transition du modèle intensif actuel vers un régime alimentaire plus sain et durable passe notamment par une réforme radicale de la Politique Agricole Commune (PAC).

Freiner la croissance démographique est également essentiel selon Hawken, et c’est pourquoi l’accès des filles à l’éducation et la planification familiale font partie des mesures les plus efficaces. Ces exemples illustrent parfaitement que la lutte contre le changement climatique et la lutte contre la pauvreté peuvent (et doivent) trouver des synergies et des solutions communes (Citoyenspourleclimat.org, 2019). En France, la convention citoyenne pour le climat (dont les propositions ont été remises au gouvernement il y a quelques semaines) avait d’ailleurs pour mandat de proposer une série de mesures permettant de réduire les émissions de gaz à effet de serre « dans un esprit de justice sociale ».

V. GÉRER L’INÉVITABLE

Même un réchauffement limité à 1,5°C ou 2°C aurait des impacts significatifs. En parallèle de l’atténuation du changement climatique, il faut donc développer dès maintenant des stratégies d’adaptation. Cette question est pourtant peu présente dans le débat public : le signe d’une grande impréparation (Alternatives économiques, 2019c).

S’adapter, c’est mettre en œuvre des solutions permettant de limiter les dommages environnementaux, sanitaires et socio-économiques liés aux évolutions du climat. Ainsi, pour s’adapter à l’augmentation des inondations au Bangladesh, il faut construire des terrains surélevés, opérer une transition vers l’aquaculture et les cultures tolérantes au sel et construire des réservoirs d’eau douce.

Autre exemple : pour rendre les épisodes de canicule plus supportables en ville, il faut réintroduire de l’eau et de la nature dans les rues et sur les toits, ce qui peut réduire localement la température de 2°C (reseauactionclimat.org, 2019).

Développer des stratégies d’adaptation, ce n’est pas se résigner ni renoncer à la réduction parallèle des émissions. Il est indispensable d’associer dès maintenant ces deux types de politiques pour limiter au maximum les impacts du changement climatique (Alternatives économiques, 2019c).

Vivien Lecomte


Article rédigé par Vivien Lecomte, 12 juin 2020 – Ecotoxicologie.fr : tous droits réservés

EN SAVOIR PLUS…

Comment s’aligner sur une trajectoire compatible avec les 1,5°C ? – B&L Evolution – 2018
Drawdown, Comment inverser le cours du réchauffement planétaire – Paul Hawken – Actes Sud, avril 2018, 550 pages
Rapport spécial « Le réchauffement climatique à +1,5°C – Groupement d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC) – Résumé à l’attention des décideurs – 2018 + le résumé du rapport fait par « Citoyens pour le climat »
La mise en place d’une taxe carbone européenne pourrait bénéficier aux ménages modestes, www.notre-planete.info, Vivien Lecomte, 14 mai 2020

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