
Les pesticides ont un effet sur la biodiversité
PAR NATHALIE CHÈVRE
(N’hésitez pas à commenter l’article et à poser vos questions en bas de page 🙂 )
Une étude internationale, basée sur l’analyse de plus de 1700 publications scientifiques, a montré que les pesticides avaient un effet sur les espèces non-ciblées, et donc sur la biodiversité.
Parue dans Nature communications fin janvier 2025, cette étude est la plus complète à ce jour.
Notons au passage que Nature communications est une revue de qualité. Et que l’étude a mis plus d’un an et demi avant d’être publiée, ce qui veut dire qu’elle a été revue et améliorée au fil des relectures critiques d’autres scientifiques avant d’être acceptée. Cette remarque pour celles et ceux qui pensent que la science n’est ni crédible, ni sérieuse.
Mais revenons à nos moutons… ou à notre étude.
Les chercheurs ont donc collecté les données de 1 705 études à travers le monde, soit en Europe, aux États-Unis, en Asie, en Amérique du Sud, et quelques sites en Afrique. Les effets sur 830 espèces ont été répertoriés (560 animaux, 192 plantes et 78 microorganismes). S’y ajoutent des données sur des groupes d’espèces. Les données analysées couvrent 471 pesticides (243 insecticides, 104 fongicides et 124 herbicides).
Des effets sur un large panel d’espèces
Les résultats sont sans appels. Les pesticides affectent négativement la croissance, la reproduction et le comportement des espèces terrestres et aquatiques. De plus, les pesticides développés pour agir contre certains groupes spécifiques affectent des espèces assez éloignées de ces groupes. Par exemple, les insecticides, développés pour tuer les insectes, ont un impact sur les amphibiens comme les grenouilles.
Plus généralement, les effets toxiques des pesticides sont plus prononcés en régions tempérées qu’en région tropicale. Pourquoi ? Une hypothèse avancée par les chercheurs est qu’ils se dégraderaient plus vite en région tropicale en raison d’une activité accrue des micro-organismes
Enfin, point important, les nouveaux pesticides ne font pas mieux que les anciens. Les auteurs mentionnent qu’il n’y a pas d’évidence que l’impact sur la biodiversité ait diminué avec les pesticides nouvellement autorisés sur le marché. Ce qui aurait dû être le cas considérant que les procédures d’homologation sont maintenant plus strictes. On demande en effet aujourd’hui beaucoup plus de tests à un industriel qui veut mettre une substance sur le marché. De nouveau, pourquoi ? Peut-être bien parce qu’un pesticide reste avant tout une substance toxique destinée à tuer ?
Protéger la biodiversité pour protéger notre santé
N’en déplaise aux ardents défenseurs d’une agriculture intensive, les faits sont là. On peut moquer la science, vouloir la faire taire, cela ne changera pas la situation. La biodiversité est en chute libre à travers le monde, et les pesticides participent à cette chute.
Certes, les pesticides permettent de lutter contre certains ravageurs et ils font partie des outils à disposition des agriculteurs pour produire de manière plus ou moins stable. Mais continuer à les utiliser sans réfléchir aux alternatives et/ou déréguler leur utilisation, c’est faire le choix de contribuer à la disparition des espèces autour de nous.
Mais pas seulement. Car la biodiversité n’est pas une entité autour de nous. Nous en faisons partie. Elle contribue à notre santé. Les chants des oiseaux sont par exemple bénéfiques pour la santé. Il suffit de voir le nombre de réveils qui utilisent ce type d’enregistrement. Les regarder également. On peut également parler des bains de forêt, très en vogue depuis quelques années.
Il est donc important et urgent de continuer à travailler pour diminuer l’utilisation des pesticides, en partenariat avec le monde agricole, et en gardant en tête que le but est d’en utiliser le moins possible. N’en déplaise à l’industrie.

Article posté le 15 mars 2025 par Nathalie Chèvre, maître d’enseignement et de recherche à l’Université de Lausanne, Suisse.
Si vous souhaitez lire l’étude : Wan et al. 2025. Pesticides have negative effects on non-target organisms. Nature communications.

